L’Arche à Clermont-Ferrand a ouvert un premier habitat partagé lundi 1er novembre 2021. Après sept années de sensibilisation au projet d'ouverture d'une nouvelle communauté de L'Arche, de mobilisation d’un réseau d’amis, de démarches auprès des pouvoirs publics, cinq personnes ayant un handicap mental partagent désormais leur quotidien avec trois salariées dans une maison à Chamalières, commune limitrophe de la capitale auvergnate.
Il fait très beau ce lundi matin 1er novembre en Auvergne. Sont présents les cinq résidents et leurs familles, les trois nouvelles salariées et quelques membres du bureau.
Valentine, une jeune femme trisomique, répète : « Au revoir papa, maman » - c’était son rêve de quitter le domicile familial ! Tiphaine, quant à elle, connait par cœur les paroles de Je vole de Michel Sardou, et chante en boucle : « Mes chers parents, je pars, je vous aime mais je pars… ». Etienne, qui est autiste, est un peu plus inquiet : « Je suis content, mais je ne sais pas ce qu’il va se passer maintenant. » Mathilde, qui arrive de Paris, a quitté ses fonctions de juriste en entreprise pour mettre du sens dans son travail et a rejoint l’aventure. Hanane ne rêvait que d’une chose : « Être salariée à L’Arche ». Mélanie, la responsable de la maison, accueille chacun avec des mots charmants et leur remet une clé (symbolique) leur chambre.
Je dois vous avouer que je n’ai pas pu m’empêcher de pleurer."
Hélène Laurichesse, présidente de l’association porteuse du projet
« Je dois vous avouer que je n’ai pas pu m’empêcher de pleurer, d’émotion et de fatigue…», confie Hélène Laurichesse, présidente de l’association porteuse du projet de L'Arche à Clermont-Ferrand. D’émotion, on peut l’imaginer : voir ces parents qui accompagnent leurs enfants depuis tant d’années et s’en séparer parfois pour la première fois : « ils voyaient L’Arche comme un endroit idéal pour leur enfant et voilà que ce dernier y pose enfin ses meubles, y aménage sa chambre ».
Et pleurer de fatigue ? « Si on m’avait dit que ce projet de fondation de L’Arche à Clermont-Ferrand allait durer sept ans, je n’y aurais pas cru, reconnait Hélène. Et arrive le jour où elle ouvre, et je n’arrive pas à y croire non plus. Est-ce réel ? » Durant cette dernière année, Hélène et un petit bureau ont suivi les travaux, fait des budgets et encore des budgets, des entretiens d’embauche, des attributions, des fiches de paie… Une course contre la montre pour que l’ouverture puisse avoir lieu ce 1er novembre ! Hélène n’a pas fait de grand discours pour l’occasion, mais a simplement offert un petit olivier en guise de cadeau d’ouverture. « Un olivier en Auvergne ! s’amuse t’elle, il représente notre jeune communauté : il aura besoin de l’aide de tous pour porter ses fruits ».
Un projet comme ça ne se monte en effet, pas tout seul. Il faut un conseil d’administration dynamique, des compétences, des membres actifs, le soutien des pouvoirs publics, de de la fédération de L'Arche en France et de la fondation Les Amis de L'Arche... « Et on a eu tout cela, reconnait Hélène : nous avons une belle association, avec des membres merveilleux, des parents incroyables, des personnes handicapées qui motivent et qui nous donnent des ailes avec leur grands sourires et leurs gros câlins. » « Notre premier objectif était d’ouvrir une Arche à Clermont-Ferrand. Notre deuxième objectif : aider la ville à changer de regard sur le handicap mental. » L’association porteuse du projet a fait beaucoup de choses depuis sept ans : des témoignages dans les écoles, des concerts, des trails, courir la clermontoise… « On voulait montrer que les personnes ayant un handicap sont là, qu’elles existent, qu’elles sont heureuses malgré le handicap », explique Hélène.
Le projet d’une Arche à Clermont consistait en l’ouverture de deux habitats partagés et d’un espace rencontre. Très vite le Conseil Départemental a apporté son soutien : une délégation avait visité L’Arche à Lyon et était revenus frappés par « l’éthique et la sérénité » qui y régnait. Un lieu a été proposé en centre-ville de Clermont-Ferrand. Alors que la communauté ne devait pas ouvrir avant quelques années, le projet s’est brusquement accéléré en 2020... Tandis qu’Hélène Laurichesse revenait d’une visite de L’Arche à Grenoble, elle partage ses impressions : « Ce qu’il nous faudrait, c’est une grande maison avec un jardin ». Or ce jour-là, une personne entend ce vœu, rentre chez elle et le partage à son mari : « Une grande maison avec un jardin… Tu te rends comptes ? C’est exactement ce que l’on a. » Après réflexion, ils décident de faire une donation temporaire de leur maison, et c’est ainsi que le premier habitat partagé de L’Arche à Clermont-Ferrand est né.
« Cette première maison est ouverte, quel soulagement ! se réjouit Hélène, mais il faut retrousser nos manches rapidement pour ne pas perdre la dynamique et ouvrir le deuxième habitat très vite. » La communauté s’agrandira en 2023 avec l’ouverture de son site principal dans un ancien ensemble scolaire, en plein coeur de Clermont-Ferrand. Deux habitats accueilleront chacun huit personnes avec un handicap. Le site sera partagé avec un autre projet, un foyer de quarante-neuf étudiants. Tout un programme. Bravo et bon vent L’Arche à Clermont-Ferrand !